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PSYCHIATRIE : AIDE OU TRAHISON ?
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PSYCHIATRIE : AIDE OU TRAHISON ?
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26 octobre 2006

Prisons psychiatriques de l’ex-URSS : transformer une thérapie en supplice

À propos du livre d'Elizabeth Antébi Droit d’asiles en Union Soviétique, paru dans les années 1970.

«Un épouvantable document. La quintessence de l’horreur et de l’horrible. Comment les Soviets ‘soignent’ les opposants dans leurs chaînes d’hôpitaux psychiatriques : ‘Avec des médicaments la plupart du temps fréquemment utilisés par les psychiatres, et à juste titre dans les cas cliniques, mais qui deviennent une torture pour les hommes sains: la sulfazine, qui paralyse les mouvements et porte la fièvre à 40°; l’aminazine, qui hébète le malade; l’enveloppement avec un drap mouillé qui se rétrécit et broie le corps en séchant; la triftazine; l’halopéridol, la plupart du temps donné sans correcteur, qui donne envie de se lever si on est assis, de s’asseoir si l’on est debout, et provoque de terribles douleurs, etc.’ L’univers hospitalier soviétique serait-il pire encore que l’univers concentrationnaire national-socialiste? C’est une véritable catastrophe intellectuelle qui jette l’Occident désemparé ‘dans un monde sans signes, altère son propre langage, réduit à néant ses références et ses symboles’. Toutefois nous espérons avec l’auteur de ce livre que ‘grâce aux dissidents russes, l’Occident retrouvera le sens de ce qui est humain’ écrit Eugène Ionesco dans une courte mais belle préface. Droit d’Asiles en Union Soviétique rappelle ce mot terrible d’Albert Camus : ‘Tout révolutionnaire finit en oppresseur ou en hérétique…’ Un témoignage d’épouvante qu’il faut absolument avoir lu. »
– Georges Moinard La Villedieu, Agence de presse Thibaut Le Berre A.P., 6-7 juin 1977. (Repris par Impact et par La Gazette de la Région du Nord, juin 1977)

Elizabeth Antébi a interrogé non seulement les ‘dissidents’ qui sont passés par les asiles psychiatriques répressifs, mais aussi les psychiatres qui font marcher la machine, qu’ils soient aujourd’hui en exil ou travaillent toujours en Union Soviétique. C’est-à-dire qu’elle a investi le système de l’intérieur et de l’extérieur, par les victimes comme par les inventeurs théoriques et pratiques de cette nouvelle coercition et par ses fonctionnaires.

[…] Le plus stupéfiant, dans les interviews recueillies par Elizabeth Antébi est de découvrir chez les psychiatres soviétiques aujourd’hui exilés en Israël qu’ils n’ont rien perdu de leur foi – ou de leur conditionnement – par le système et qu’ils considèrent comme relevant de la pathologie les opposants politiques, sociaux ou religieux. Et le grand mérite du livre est précisément de faire comprendre que la répression psychiatrique soviétique n’est ni un expédient provisoire, ni une déviation accidentelle, mais un aboutissement de l’évolution du système et qu’elle lui est aussi consubstantielle que l’extermination par les camps l’était au stalinisme ou au nazisme.

C’est exactement parce qu’ils sortent du système, qu’ils refusent son langage de bois, ses mécanismes d’oppression et de décérébration, bref la ‘normalité’ que les dissidents s’exposent à une médecine – à plus forte raison une psychiatrie – qui portent la marque indélébile des conditions totalitaires où elles se développent depuis plus d’un demi-siècle. Seuls les jeunes psychiatres parviennent à rejeter le carcan. Comme dit très bien l’un d’entre eux, le docteur Edgar Goldstein : ‘Tout le système soviétique et socialiste est en cause, car si les droits des gens normaux ne sont pas respectés, pourquoi respecterait-on ceux des ‘anormaux’ ?’ C’est là, très exactement, le fond de la question.[…] Cette mise en évidence du processus historique en constitue l’aspect le plus neuf et le plus décisif pour la compréhension du phénomène. La conquête de l’identité nationale, les affres des décisions d’exil, le combat impitoyable avec les administrations et le KGB pour l’obtention des visas, tout cela, qui est mieux connu, n’a jamais encore été rapporté avec cette précision et ce respect des femmes et des hommes qui témoignent. »
– Pierre Daix, Le Quotidien de Paris, jeudi 12 mai 1977.

[…] La science vous rectifie une cervelle non alignée en trois bonbons, cinq gouttes et dix électrochocs. C’est tout de même plus propre. Au début, on s’étonnait de voir des psychiatres, des hommes de science, se rendre complices de la répression en Union Soviétique. On se révoltait, on s’obstinait à gueuler contre la monstrueuse aberration. Et puis il a fallu admettre qu’il était dérisoire de ressasser les litanies du cauchemar, Amalrik, Boukovski, Plouchtch, Soljenitsyne, tous les dissidents reletés en exil vers les ténèbres extérieures le répétaient. Il suffisait de les entendre : il ne s’agit pas de perversion mais d’une logique effroyable, à se cogner la tête contre les murs. Ecoutez ce qu’a répondu le docteur Marat Vartanian, l’un des toubibs responsables de ces usines soviétiques à briser chimiquement les êtres, à une journaliste française, Elizabeth Antébi, qui a eu le culot d’aller interviewer là-bas, avec un simple passeport d’étudiante, les fabricants de socialistes rectifiés : ‘La psychiatrie dépend toujours plus ou moins du régime politique au sein duquel elle se développe. Bien sûr, nous avons fait quelques erreurs, comme dans l’affaire Medvedev. Mais nous sommes prêts à admettre auprès de nous des psychiatres occidentaux de bonne foi qui étudieraient avec nous dossiers et malades …’[…]»
– Bernard Thomas, Le Canard Enchaîné, 22 juin 1977.

« En 1966, avec l’expulsion de Valéri Tarsis, l’Occident découvre avec stupeur qu’on enferme dans des asiles psychiatriques des hommes et des femmes dont la seule maladie est de ne pas être en accord avec le régime et de réclamer un peu de liberté de pensée, d’action, de vie. La libération de Plioutch, l’échange Boukovski-Corvalan ont récemment rappelé à un Occident douillettement installé dans la quiétude de sa liberté, le drame atroce que vivent ces hommes, ces femmes, coupables de vouloir sauvegarder les droits et la dignité de la personne. Elizabeth Antébi a interrogé les victimes et une dizaine de psychiatres soviétiques. L’ouvrage qu’elle vient de publier est un document bouleversant dont nous publions ci-dessous un extrait.[…] »
Rhône Alpes, 19 mai 1977.

« Quand Boukovski transmet en 1971 au congrès international de psychiatrie le dossier des dissidents internés dans les asiles pour délit d’opinion, les psychiatres réagissent avec embarras. Pourtant, depuis l’expulsion de Valeri Tarsis en 1966, l’Occident a appris avec stupeur les internements politiques. L’affaire Pliouchtch, puis l’échange Boukovski-Corvalan obligent le parti communiste français lui-même à condamner cette forme de répression. Est-il sincère dans cette dénonciation, ou manœuvre-t-il habilement pour empêcher l’opinion publique de se poser des questions de fond ? Pourquoi la gauche officielle a-t-elle attendu soixante ans pour s’élever contre des crimes perpétrés au nom du bonheur de l’homme? L’arme psychiatrique n’est-elle pas, en définitive, la conséquence inéluctable et presque caricaturale d’un langage monolithique qui réécrit le passé, tronque le présent, au nom du meilleur des mondes futurs? […] Les documents sont nombreux et accablants. Les victimes ne sont pas seulement des intellectuels, mais aussi des ouvriers, des gens du peuple, qui ont eu le malheur de croire aux promesses des dirigeants et qui ont cru protester dans l’intérêt du peuple, des marxistes convaincus défendant des gens ou des principes qui ‘n’existent pas’ dans le langage officiel. Les ‘anormaux’ sont ceux qui refusent obstinément la normalisation.[…] Plus que jamais ce débat concerne l’Occident, imbibé sans peut-être le savoir par ce langage, par cette ‘grille’ de pensée, qu’il l’accepte ou la rejette : ‘Si les fous soviétiques nous concernent, écrit E. Antébi, c’est qu’ils ont dénoncé cette politique de l’huître rivée à son rocher, muette, et dont l’inéluctable destin reste d’être gobée.’[…] Ne craignons pas d’être taxés de fous parce que nous dénonçons sans relâche la barbarie qui se couvre des oripeaux du bien du peuple, ne soyons pas dupe d’un langage qui nous englue dans la toile au coin de laquelle l’araignée guette. »
– Gérard Nirascou, Le Figaro.

« Après les multiples témoignages dénonçant la répression politique en URSS, c’est au tour d’une journaliste, E. Antébi, de constituer un dossier minutieux sur les victimes d’un régime qui, grâce à la médecine, a remplacé les menottes par la seringue pour réduire à néant les contestataires. Elle a interrogé une dizaine de psychiatres soviétiques en Israël, en Amérique, en Europe et même en URSS. Elle a rencontré à Moscou l’académicien Sakharov, le professeur Snejnevski, théoricien de la psychiatrie soviétique et, bien entendu, les victimes des cliniques spéciales qu’elle nous présente, nous relatant le cas de chacun. […] La liste est longue, effarante. On reste atterré devant les motifs invoqués. Ainsi, les convictions religieuses sont considérées comme pathologiques. Le général Grigorenko, héros de la dernière guerre mondiale, marxiste militant et major général à l’Académie Vorochilov, a été interné deux fois et dégradé pour avoir pris position contre l’antisémitisme et s’être élevé contre les salaires indécents des membres du parti. »
– Françoise de Comberousse, France-Soir.

« A lire Droit d’Asiles en Union Soviétique, document d’Elizabeth Antébi, on est transporté au-delà de toute discussion médicale ou ésotérique sur la psychiatrie et une description à la fois froide et brûlante des prisons psychiatriques d’URSS continue à interpeller le lecteur bien après qu’il ait refermé le livre.[…] Si en URSS on ne fusille plus comme dans les années 30 des grands procès, on interne volontiers, on camisole, on anéantit, on détruit avec la complicité de psychiatres-kapos l’homme différent, le contestataire, le croyant en Dieu – ne faut-il pas être fou pour croire en ce qui n’existe pas? -, le ‘déviant sexuel’ comme le cinéaste Paradjanov, le non-conformiste, celui dont le KGB décide qu’il n’est pas comme les autres. Elizabeth Antébi fait de la psychiatrie inquisitoriale du Kremlin une relation hallucinante et tente d’analyser comment des hommes de science ont pu transformer une thérapie en supplice, en décrétant paradoxalement ‘que dans une société marxiste est fou celui qui refuse l’aliénation’. Mais les ‘fous’ des prisons psychiatriques soviétiques ne dérangent pas seulement le Kremlin. ‘L’Occident, écrit Elizabeth Antébi, la gauche surtout, s’affole à l’idée de remettre en cause l’Etat socialiste ‘et tout un langage officiel, dogmatique, empêche l’homme d’être un militant ‘nomade’, celui qui vole au secours de l’être persécuté où qu’il puisse se trouver’. Pour cette raison, les ‘fous’ soviétiques et les ‘fous’ de partout nous concernent. A tous ceux qui travaillent à un ordre économique mondial et à une détente fondée sur des relations commerciales sans préalable, il faut dédier cette observation de Chifrine, un ex-détenu d’Union Soviétique : ‘Deux fois j’ai vu de mes propres yeux et maintes fois j’ai entendu dire que des prisonniers se coupaient la main et les jetaient dans les voitures avec le bois. Ils me disaient : Nous voulons que les peuples d’Occident sachent qui a coupé ce bois. Ce bois est destiné au monde libre. Quand je suis venu en Occident, j’ai interrogé quelques personnes qui font commerce de bois avec l’URSS. Je leur ai demandé : Vous est-il arrivé parfois de trouver des mains coupées dans le bois ? Ils m’ont répondu : Oui. Je leur ai demandé pourquoi ils n’en avaient rien dit à la presse ou à la radio. Ils m’ont répondu : Impossible. Nous devrions alors cesser tout commerce avec l’URSS. »
– Henri Smolarski, Tribune Juive, 2 juin 1977.

Source: © Elizabeth Antébi.


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