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PSYCHIATRIE : AIDE OU TRAHISON ?
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PSYCHIATRIE : AIDE OU TRAHISON ?
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18 août 2006

6000 cas de maltraitance chez les enfants et les adolescents handicapés

S_nat

Maltraitance envers les personnes handicapées : briser la loi du silence

LES MALTRAITANCES EN INSTITUTIONS

A. UNE RÉALITÉ ANCIENNE MAIS LONGTEMPS DISSIMULÉE

1. La maltraitance envers les personnes handicapées n'est malheureusement pas une nouveauté

La maltraitance, y compris celle à l'égard des personnes handicapées, est un phénomène ancré dans la réalité humaine mais qui, en raison de la nature même du handicap, peut être amplifié par certains facteurs.

M. André Laurain, président de ALMA H 54, a indiqué que, selon des travaux récents, le fait d'être handicapé multiplie par trois le risque de subir un acte de criminalité et, en cas de déficience mentale, par quatre, le risque de subir des abus sexuels.

Ce qui est certain en revanche, c'est que la maltraitance envers les personnes handicapées a très longtemps, et aujourd'hui encore, constitué un sujet tabou.

Ainsi que l'a expliqué M. Claude Meunier, directeur général adjoint de l'APF, « aujourd'hui, nous avons l'impression d'entendre beaucoup d'histoires. En réalité, elles ont toujours existé, mais certaines choses ne se disaient pas auparavant. De même, nous avons connu des cas de personnes qui se sont mises à parler dix ans après les faits. Vu ce qu'il se passait et ce qui était publié dans la presse, elles se sont manifestées pour dire qu'elles aussi avaient été victimes de maltraitance ».

M. Serge Lefèbvre, vice-président de l'APAJH, a considéré que le phénomène de la maltraitance des personnes handicapées n'avait pas augmenté, précisant même qu'« il n'y a pas plus de maltraitance qu'il n'y en avait auparavant. Il y en a même probablement moins ».

Quant à M. Pascal Vivet, éducateur spécialisé, il a insisté sur le fait que les cas de maltraitance envers les personnes handicapées étaient en réalité mieux connus que par le passé, ce qui peut donner l'illusion qu'ils sont plus nombreux. Selon lui, aucun élément statistique ni constat sur le terrain ne permet d'affirmer que les mauvais traitements d'enfants ou d'adolescents handicapés sont en augmentation. Il a précisé que « simplement, nous découvrons aujourd'hui ce que nous n'avons pas voulu entendre auparavant ».

Ce constat est également partagé par M. André Loubière, directeur des actions médicales et sociales de l'AFM : « nous ne sommes pas autorisés à dire qu'une aggravation s'est fait sentir. Aucun élément ne nous permet de tenir un tel discours. (...) Nous constatons que des situations de maltraitance sont beaucoup plus portées à notre connaissance que par le passé. Ceci est un fait ».

Un message reçu sur l'adresse électronique de la commission d'enquête : un cas de maltraitance physique et de menaces à l'endroit d'un résident trisomique

« Le 18 février, une AMP (aide médico-psychologique) a été témoin, ainsi que d'autres professionnels, d'un acte de maltraitance sur la personne d'un handicapé trisomique, M. X, résident au foyer médicalisé de ..., maltraitance par un professionnel qui effectuait des travaux de rénovation dans l'établissement avec sa petite équipe de travailleurs handicapés.

« Les faits : le 18 février à 15 h 30, l'AMP est appelée par une aide soignante et un autre AMP sur l'aile n° 2 de l'établissement. Le résident avait marché dans du ragréage : le moniteur interpelle M. X en criant. Paniqué, M. X marche une seconde fois et donne un coup de pied dans un buffet de cuisine. L'AMP a alors vu le moniteur perdre son sang froid, se jeter sur M. X, lui faisant perdre l'équilibre. À terre, M. X a reçu des coups de pieds aux fesses, puis a été traîné sur le sol, tiré par son écharpe autour du cou, le visage violet et la langue sortie.

« Atterrés par ce spectacle, les deux AMP sont intervenus verbalement pour faire lâcher prise. Les résidents présents étaient tous paniqués : pleurs, cris. Le moniteur a lâché M. X puis l'a menacé encore une fois d'une « raclée » dans la chambre s'il provoquait des difficultés et il a ajouté : « là je n'étais pas même en colère, demandez à mes gars comment cela fait quand j'y suis ». Après les faits, M. X est resté prostré, incapable de se lever, de parler pendant une demi-heure.

« L'AMP a rendu compte à son chef de service qui a minimisé les faits et indiqué qu'il convoquerait M. X dans son bureau en présence de l'AMP pour lui signifier qu'il ne doit pas abîmer le matériel lorsqu'il est en colère ».

Les violences les plus fréquemment signalées sont  les violences sexuelles, à hauteur de 48 %, soit 104 cas, dont 30 viols, les violences physiques, pour 21,5 %, soit 47 cas. Les signalements de négligences graves représentent 17 cas, soit 7,7 % et les violences psychologiques 4,5 %. Dans 7,3 % des cas, violences sexuelles et physiques se cumulent.

Parmi les 75 adultes handicapés victimes de maltraitance ou de violence, deux fois sur trois la victime est une femme. Sur 116 mineurs victimes, on dénombre deux fois plus de garçons que de filles.

Les auteurs de maltraitance sont, dans 59 % des cas, des membres du personnel, et, dans 38 %, des résidents. Pour ce qui concerne les situations de maltraitance dont les victimes sont des mineurs avec un handicap, une fois sur deux, les auteurs présumés sont des co-résidents.

Une enquête administrative est diligentée dans plus de la moitié des situations, soit 56,6 % des cas, et le procureur de la République est saisi dans 84 % des cas.

À la mi-avril, 53,4 % des dossiers font l'objet d'une enquête préliminaire, 21 % des dossiers, soit 46, ont été classés sans suite, 10 ont donné lieu à une mise en examen et 10 incarcérations ont été prononcées.

Mme Anne-Sophie Parisot, membre du CDH, a contesté la réalité des chiffres de signalement donnés par la DGAS pour 2001 : « si, en 2001, seulement 151 affaires de maltraitance de personnes handicapées sont parvenues au ministère des affaires sociales par l'intermédiaire des directions départementales de l'action sanitaire et sociale (DDASS), les associations estiment leur nombre à plusieurs centaines par an ».

La commission d'enquête a entendu un témoignage faisant état d'au moins 6.000 cas de maltraitance chez les enfants et les adolescents handicapés en 2001, ce qui représente un chiffre considérable, bien supérieur à celui des signalements reçus par la DGAS au cours de la même année, soit 151. Elle souhaite donc rapporter ce témoignage, mais précise qu'il s'agit d'estimations qu'elle ne reprend pas à son compte.

Les estimations rapportées par M. Pascal Vivet : au moins 6.000 enfants et adolescents handicapés maltraités en France en 2001

B. UN DISPOSITIF EN PRATIQUE PARALYSÉ PAR LA « LOI DU SILENCE »

« Il demeure une loi du silence, une chape de plomb, qui empêche les personnes de libérer leur parole face à des actes de maltraitance ou de négligence. »

Ce constat, dressé par Mme Anne-Sophie Parisot, membre du collectif des démocrates handicapés (CDH), semble très largement partagé, tant par le monde associatif que par les autorités de contrôle et la justice.

Si le dispositif de signalement est en effet désormais bien établi et, dans une large mesure, connu des professionnels et des établissements, son efficacité est paralysée bien en amont, du fait des pressions que subissent ceux qui, victimes ou témoins, veulent dénoncer des actes de maltraitance.

Il s'agit d'ailleurs de l'une des principales difficultés rencontrées par les réseaux d'écoute téléphonique ou les associations de défense des personnes handicapées : la volonté d'anonymat des appelants est manifeste et les écoutants doivent faire preuve de beaucoup de tact pour inciter les personnes à amorcer une démarche de signalement.

La commission d'enquête, elle-même, a pu s'en rendre compte, à travers les messages reçus à l'adresse électronique mise en place pour recueillir, de façon très large, témoignages et avis : la plupart des messages étaient non seulement anonymes mais ne permettaient souvent pas non plus d'identifier ne serait-ce que l'établissement où se déroulaient les faits relatés.

c) Le silence des professionnels

Selon une enquête réalisée par le ministère de l'emploi et de la solidarité entre 1994 et 1998, 54,3 % des personnels du secteur social avaient été, ou étaient confrontés à la question de la violence et de la maltraitance.

Plus encore que dans d'autres secteurs, la violence à l'égard des personnes handicapées est longtemps restée un tabou pour les professionnels. Certains intervenants ont notamment mentionné une tolérance autrefois plus grande vis-à-vis de pratiques aujourd'hui considérées comme maltraitantes, lorsqu'elles se produisent à l'encontre de personnes handicapées.

© Sénat
Source : Rapport du Sénat Maltraitance envers les personnes handicapées : briser la loi du silence.
Commission d'enquête sur la maltraitance envers les personnes handicapées accueillies en établissements et services sociaux et médico-sociaux et les moyens de la prévenir.
Publié le 12 juin 2003


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